Retour de l'âne vers la forme humaine de Lucius. Miniature d'un manuscrit de 1345 des Métamorphoses de Lucius Apulée
Il est de ces chemins que l'on ne prend jamais.
Des chemins si ténus que pas même un baudet1,
aussi têtu qu'il soit, n'y mettrait ses sabots.
Tel ce chemin de lune voguant sur les eaux.
Certains parcourent nos tables sous nos couverts
étalant leurs dentelles et leurs broderies
de coton ou de soie à l'heure des desserts
des repas familiaux, quand les enfants s'ennuient.
Il est de ces chemins qui ne mènent à rien.
Tous ces chemins de vie qui n'ont plus aucun sens
ou ces chemins de ronde usant la vigilance
de guetteurs abrutis par tant de tours en vain.
Certains trop meurtriers sont de triste mémoire.
Tel celui des dames2 où, avant les poilus3,
par milliers au combat, les "Marie-Louise"4 ont chu
pour servir la cause d'une funeste gloire.
Il est de ces chemins que l'on n'ose emprunter.
Le chemin de traverse est de ce type là,
car on craint de s'y perdre ou de trop s'y trouver
et on peine alors à faire le premier pas.
C'est en effet l'inverse d'un chemin royal,
rien n'y est balisé tout nous paraît fatal.
Mais si nous choisissons ce chemin hasardeux,
enfin il se pourrait que nous marchions heureux.
de Jean-Luc Aotret
1- nom populaire de l'âne
2- Adélaïde et Victoire filles du roi Louis XV
3- surnom des soldats de la guerre 14-18
4- surnom des conscrits de la classe 1814